Clivage droite/gauche, Politique réalité ou réalité politique ?

On ne compte plus les études statistiques sur ce point, il suffit de se reporter au Vote de tous les refus de Pascal Perrineau ou à L’état de l’Opinion d’Olivier Duhamel. Ces études soulignent toutes, ainsi qu’il fallait s’y attendre, que de plus en plus d’électeurs estiment que le clivage droite/gauche est dépassé. Comme s’ils avaient plus de difficulté qu’auparavant à donner un contenu à ses deux notions, comme si à leurs yeux la différence entre la droite et la gauche s’était brouillée. Mais dans le même temps, qui le nierait, il est évident que ce clivage persiste. Pour Marcel Gauchet, cette apparente contradiction s’explique par le fait que le clivage droite/gauche s’est moins atténué qu’il ne s’est profondément relativisé. Il est en quelque sorte devenu « négatif » au sens où les électeurs s’identifient surtout au refus de l’autre camp alors qu’ils s’identifiaient à leur propre camp. Pour beaucoup d’électeurs de gauche, qu’est la droite sinon avant tout l’anti-gauche ? L’intégration du pluralisme politique explique largement cette relativisation du clivage droite/gauche. L’alternance est rentrée dans les moeurs, la coexistence des deux camps norme désormais la conscience politique. Sans doute, ce pluralisme est-il de résignation mais il conduit néanmoins à concevoir le clivage persistant entre la droite et la gauche d’une autre façon. La vraie question est devenue : comment retrouver une identité politique fondée sur des principes à l’heure du pluralisme ? Je vous propose de visionner l’intervention de Marcel Gauchet au débat organisé le 30 octobre 2006 par Génération d'idées, association de trentenaires et quadras, sur la pertinence du clivage droite-gauche. Le rédacteur en chef de la revue Le Débat considère ainsi ironiquement qu'« en apparence, le clivage droite-gauche semble avoir pris un sacré coup dans l'aile. Chaque camp a perdu son fonds de commerce: la révolution pour la gauche, et les traditions à conserver pour la droite ». Leur opposition est malgré tout « en bonne santé, s'amuse-t-il . D'ailleurs, c'est nous qui l'avons exportée dans le monde entier. Un bon produit en somme...»